Sujet publié le 4 novembre 2009 sur actutoulouse.fr
http://www.actutoulouse.fr/20091104457/portraits/portraits/gina-lalternative-qbuena-vidaq.html Interview réalisée dans l'après-midi du samedi 31 octobre 2009, à la terrasse d'un café au Grand Rond, à Toulouse.
Photo: Constance Thieux
Figure du mouvement rock alternatif des années 80 aux côtés de la Mano Negra, des VRP et autres Garçons Bouchers, Gina la Toulousaine d’adoption remonte sur scène, assagie. Un peu seulement.
Elle ne paye pas de mine, Gina. Allures de quinqua sympa, rouge à lèvres carmin, talons aiguilles et tailleur sexy. Rien sur elle ne laisse deviner un passé pour le moins électrique. Comme quoi, une vie rock n’ roll, ça conserve. Pas du genre à économiser sa parole, il suffit qu’elle lance sa voix nasillarde pour partir vers un monologue sans refrain, sans fin. Qu’on se le dise, chez Gina, les chichis et les tabous n’ont pas leur place. « J’ai un parcours très chaotique », lance celle qui a participé à l’effervescence du mouvement rock alternatif à partir de la fin des années 80.
Souvenez-vous, c’est elle qui a écrit les paroles de « L’escalier » pour Los Carayos, le groupe emmené par Manu Chao. Même son de cloche pour « La misère des voix vulgaires », interprétée par les VRP. Et puis, le personnage féminin dans le clip « Mala Vida » de la Mano Negra, c’est encore Gina. En bonne copine du groupe, elle avait empoché « 1500 Francs (environ 230 euros, ndlr). Quand je vois que le clip tourne encore en boucle à la télé j’aimerai bien toucher des droits et qu’on me paye, comme une comédienne le serait, pour apparaître sur un clip de la Mano. » Et d’ajouter en soupirant : « Si seulement mon compte en banque était aussi gros que ma renommée… »
En effet, les « cartons » dont elle a signé les textes n’ont pas fait sa fortune. A l’époque, on ne disait pas à la Sacem qui était l’auteur d’une chanson. Et puis, dans nos têtes, c’était honteux de gagner de l’argent en étant artistes. Avant de penser argent, on voulait secouer la bourgeoisie. Alors, j’étais au RMI et je vivais dans des squats. Maintenant, c’est fini, je refuse d’être esclave. »
« J’étais trash »
Après avoir sorti deux albums sous le nom de Gina et l’Orchestre, elle met un point final à l’aventure parisienne en 1995. Elle reconnaît qu’il y avait « pas mal d’embrouilles. Mais on savait pourquoi on se foutait sur la gueule. » Logiquement, les instigateurs du mouvement ont ressenti le besoin de respirer. Il était tant que cela s’arrête pour tout le monde. Gina la première. « Le mouvement a été douloureux pour moi. J’étais trash, folle et j’envoyais chier tout le monde. C’était dans ma tête, c’était mes vieux démons. Pourtant, aujourd’hui, les gens me disent que ce que je faisais, c’était du génie. Mais au sein des groupes, on ne me le disait pas, alors je n’en prenais pas conscience. »
A la fin du mouvement, chacun est retourné à sa place. Gina, elle, est devenue romancière. « J’étais dans la merde, alors je me suis dit que ce que je savais faire, c’était écrire. Je me suis mis dans les bouquins parce que plus personne ne voulait travailler avec moi dans la chanson. » Les compagnons de joies et de galères se montrent alors moins présents. « J’ai des nouvelles de certains. Manu (Chao), c’est plus compliqué. C’est une star mondiale. Je ne le vois plus. On s’est juste revus il y a quelques années. Il m’a sauté dans les bras. Il sait que si un jour il est dans la misère, il peut frapper à ma porte, il est le bienvenu », dit-elle entre ironie et sincérité.
En 2001, elle décide de tout plaquer. Fini Paris, bonjour Toulouse. Pour vivre, elle enchaîne les « boulots de prolos. Mais je suis une musicienne frustrée et je dois dire que Toulouse m’a réconciliée avec mon passé. »
« Je reprends la route que j’avais abandonnée »
Alors, celle qui assume totalement son côté « mégalo » a repris sa carrière artistique en main. « J’aime la scène, prendre le micro. » Avec ses acolytes pianistes que sont Daniel Masson et Jérôme Vaccari, elle retrouve un public multi générationnel dans des concerts mêlant chansons et anecdotes. « Je suis provoc’ mais pas trash. J’ai envie de balancer de l’amour et de la tendresse. J’essaye de dire les choses drôlement. »
Elle qui était habituée à programmer ses concerts quinze jours à l’avance, planifie son agenda jusque 2011 et ne boude pas son plaisir. « En concert, on part à trois dans la 106. On revient chacun avec 160 euros net dans les poches. C’est bien. Je reprends la route que j’avais abandonnée. Avec le temps, je me dis que c’est mieux d’être une artiste mâture. Oui, en fait c’est un métier pour les vieux. Pour rien au monde je reviendrai à mes 20 ans ! Quand on est jeune, il nous arrive des merdes mais on recommence quand même. »
Et elle sait de quoi elle parle. « C’est une délivrance pour moi de vieillir. C’est juste dommage que les mecs de ma génération soient aussi cons. A mon âge, je gère mon business moi-même, sans être dépendante des gros requins (les maisons de disques et les tourneurs, ndlr). Mais, j’ai des titres en téléchargement gratuit sur internet et ça me fout les boules. Par contre, les gens peuvent télécharger Manu Chao tant qu’ils le veulent ! »
Dates et infos : www.myspace.com/ginaleretour
Clip "Mala Vida", la Mano Negra